Piscine municipale : règles non discriminatoires

Dans ce dossier qui fait intervenir les notions de racisme systémique, discrimination religieuse, profilage religieux et islamophobie, l’OdM donne des clarifications sur les éléments constitutifs de ces diverses manifestations de la discrimination et de leur preuve.

Écouter

Une citoyenne portant le voile et le burkini fréquente, avec ses deux enfants, une piscine municipale en 2020 et 2021, soit en pleine pandémie. Elle dépose, en avril 2022, une plainte formelle à notre bureau. Elle se dit privée de l’accès à cette piscine en raison du comportement des personnes y travaillant, celles-ci s’acharnant prétendument sur elle de façon injuste et la traitant différemment des autres parce qu’elle s’habille autrement. Elle fournit entre autres comme exemples des incidents en rapport avec l’exigence d’utiliser le gel désinfectant fourni par la piscine ainsi que des interventions ciblées à son endroit concernant le port du couvre-visage. L’incident culminant est une altercation survenue en août 2021 entre elle et une responsable aquatique au sujet de la présence de son garçon à un bain réservé aux adultes. Cet événement donne lieu à des plaintes croisées des deux protagonistes à la police. 

Treize fonctionnaires de l’arrondissement occupant divers postes sont impliqués dans ce dossier.

Expliquer

La discrimination peut prendre plusieurs formes aux termes des chartes québécoises montréalaises qui s’appliquent dans un tel cas. Ici, bien que la citoyenne prétende, entre autres, avoir été victime de racisme systémique, ses allégations s’apparentent plutôt à une manifestation de discrimination propre au profilage racial ou religieux. 

Le profilage racial inclut, entre autres, toute action de personnes en situation d’autorité qui appliquent une mesure de façon disproportionnée sur des segments de la population du fait, notamment, de leur appartenance raciale, ethnique ou nationale ou religieuse, réelle ou présumée. 

Certains comportements discriminatoires peuvent être multifactoriels, inconscients et non intentionnels. Cela dit, le seul fait que la citoyenne soit de confession musulmane et que cela puisse se voir par sa tenue vestimentaire est insuffisant pour inférer qu’une personne a fait preuve de discrimination à son endroit. Du point de vue d’une personne raisonnable musulmane portant le voile et le burkini, les faits n’appuient pas la conclusion selon laquelle le personnel a eu des comportements infantilisants ou humiliants – qualificatifs utilisés par la plaignante –– à son endroit en lui demandant de respecter les règlements de la piscine sur lesquels portaient les désaccords d’interprétation. 

La preuve circonstancielle examinée n’établit pas davantage que la citoyenne a été l’objet d’une attention ou d’une surveillance différente. En période de pandémie, les consignes sanitaires, dont le port du masque obligatoire à la sortie de la piscine, ont été appliquées de manière stricte à tous. Les motifs que la citoyenne invoque pour en être dispensée ne sont d’ailleurs pas clairs. 

Le seul traitement différentiel ou la seule exclusion à laquelle la citoyenne a été assujettie est sa suspension de la piscine à la suite de l’altercation survenue en août 2021. La décision relative à cette suspension repose notamment sur la version de la responsable aquatique corroborée par deux témoins selon laquelle la citoyenne l’aurait poussée dans le dos, entraînant de ce fait une chute et des blessures aux genoux, photos à l’appui. Dans ces circonstances, et considérant l’enquête policière en cours, la suspension jusqu’à l’issue du processus n’est pas déraisonnable ou discriminatoire : la citoyenne conserve l’option d’utiliser d’autres installations aquatiques de l’arrondissement. D’ailleurs, aussitôt qu’il a appris qu’aucune accusation ne serait portée par les autorités policières, l’arrondissement a mis fin à ladite suspension.

Résoudre

Bien que nous ne remettions aucunement en cause le fait que la citoyenne ait pu se sentir traitée différemment à certaines occasions, et en toute reconnaissance de son droit de s’exprimer librement sur l’application des règles de la piscine, nous jugeons que ce qu’elle a vécu n’était pas de la discrimination ni du harcèlement discriminatoire au sens de la Charte montréalaise des droits et responsabilités et de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.